Un peuple et son roi : regards sur la Révolution française
L’historien Patrice Gueniffey, dans sa somme sur la période révolutionnaire française, considère que la Révolution française est désormais entrée dans la « mémoire morte de l’histoire », dans une époque où nul ne rattache plus son existence à quelque chose de plus vaste et de plus ancien que soi.
C’est pourtant une matière sensible qui, ces dernières années, suscite un patent regain d’intérêt. Les « printemps arabes » de 2011 ont exhaussé de nouveau le terme de « révolution » dans le débat public, tandis que ce mois-ci de jeunes chercheurs s’attèlent à la polysémie du mot au cours d’un cycle de conférence à l’Université de La Rochelle. En outre, dans les romans de Pierre Michon ou de Denis Lachaud, dans la pièce de théâtre de Sylvain Creuzevault ou un opéra contemporain, nombreux sont les artistes tâchant de mettre en scène la Révolution non plus comme un mythe mais ainsi qu’une histoire vécue qui a laissé des traces dans l’imaginaire. L’historienne Sophie Wahnich déclare à ce propos que « les arts offrent la possibilité de retrouver ce qu’on nomme au XVIIIe siècle une raison sensible ». Ce que le cinéma vient illustrer comme un archétype, lui qui est selon l’historien spécialiste du cinéma Antoine de Baecque « l’art d’une forme sensible de l’histoire et sensible à l’histoire », une « narration sensible du monde », ou encore selon l’historien Marc Ferro « une forme privilégiée de l’histoire ». Histoire que l’historien et théoricien du cinéma Siegfried Kracauer rapproche de l’art de la caméra qui, lui aussi, essaie de « capturer par la lecture et l’imagination un univers donné ».
C’est ainsi que le cinéaste Pierre Schoeller, dont le film Un peuple et son roi est sorti ce jour sur les écrans des salles de projection françaises, a souhaité faire un film doté d’une vraie sensibilité historique, loin de caricatures réduisant l’évènement à la Terreur, elle même souvent mésinterprétée, mais élargissant le regard dans le sillage du travail d’historien. « Il s’agit de re-créer un monde, déclare-t-il, non pas un monde inventé qui nous serait étranger, mais un monde dont nous avons hérité et dont notre présent porte encore les traces. J’ai eu envie de revenir aux fondations de notre démocratie ». Alors que notre passé est, pour reprendre les termes du spécialiste de la Révolution française Jean-Clément Martin, « fabriqué par des querelles, des luttes et des guerres civiles », les œuvres de fiction qui actualisent des événements historiques et politiques aux nombreuses résonances, sont l’occasion non pas de le nier ni de l’exalter mais de le reconnaître.
Une diversité d’approches que met à votre disposition la bibliothèque universitaire!